27.4.11

Marc CHARPIN, 29 avril 2011


Retour sur l'accrochage dans Hublots du soir
et plusieurs albums à feuilleter dans La Bibliothèque du Hublot

« Des choses pour rien »
Marc Charpin parle ici de son travail de graveur et de sculpteur et
évoque les figures de Bram van Velde, de Matisse et de Picasso.
(Entretien réalisé par Yvon Le Mignan, été 2010 - durée : 12 mn)


Au commencement était la matière

Pli n°4, 2009, 92 x 60 cm, agglo gravé,
impression sur japon Kawanaka
 marouflé sur toile peinte, gris et jaune
«Pour Marc Charpin, et de son propre aveu, au commencement est la matière. Pas de concept préalable et impérieux ; pas de forme représentée qu’il s’agirait d’imprimer à toute force à un support. Mais son geste est d’abord de soumission, de soumission à ce qui est déjà là, qui préexiste, qui est donné, pas forcément dans la nature, bien sûr, mais qui, artefact, se présente et s’offre à ses sens, à sa main, à ses outils.

Le matériau, la technique sont toujours variés.Cependant, il ne faudrait pas voir dans cette diversité l’exercice d’un libre arbitre, d’un choix souverain qui manifesterait qu’il dispose et voyage ainsi à sa guise. Il s’agit bien plutôt de laisser exister et se déployer la profusion plurielle d’un réel et de ses lois, afin de se laisser déterminer par lui, et de promouvoir ensuite de l’intérieur l’éventail  de  ses  linéaments  et  de  ses  possibilités,  avec leurs limites.


Ce principe, une fois appréhendé, se décline en diverses figures et procédures, constatables. Ainsi, outre la multiplicité des matériaux et des techniques, on peut être frappé par la dominance du processus d’empreinte, pour l’essentiel gravure et lithographie. Selon les propres dires de Marc Charpin, cette manière de faire lui permet de différer la genèse de l’œuvre, d’y introduire une sorte de hiatus et de médiation. Selon la logique que je tente ici de mettre au jour, j’ajouterais, sans contredire la proposition précédente, que, comme telle, l’empreinte permet, elle aussi, à sa façon, de faire dériver la production d’un déjà-là. Comme si lui importait que le surgissement propre vienne toujours en position seconde, subordonnée, qu’il y ait toujours un préalable qui conditionne ce qui suit et advient, et lui échappe.

19.4.11

Caroline FOREST, 22 avril 2011

 Cache-cache
Mur de l'atelier








« Le peigne et le râteau, tout deux créateur de rayures, symbolisent tout à fait cette fonction de mise en ordre que constitue le passage de la trace à la marque. Rayer c’est faire des traces et mettre en rang, inscrire et orienter, marquer et organiser, c’est aussi féconder car toute organisation, toute orchestration, pour reprendre un terme musical est facteur de création. (...)
Il y a toujours dans la rayure quelque chose qui résiste à l’instauration de systèmes, quelque chose qui porte le trouble et la confusion, quelque chose qui  “fait désordre”. Non seulement la rayure montre et cache à la fois, mais elle est tout ensemble la figure et le fond, le fini et l’infini, la partie et le tout. »

Michel Pastoureau

MicheL'Étoffe du diable, une histoire des rayures et des tissus rayés
Éditions du Seuil
1991
 
Sol de l'atelier
Qu'ont en commun Saint Joseph et Obélix, la prostituée médiévale et l’arbitre de base-ball, les frères du Carmel et les baigneurs des Années folles, les bouffons de la Renaissance et les forçats des bandes dessinées, les dormeurs en pyjama et les sans-culottes de l’an II ?
Ils portent tous un vêtement rayé, signe de leur situation sur les marges ou hors de l’ordre social. 

Structure impure, la rayure est longtemps restée en Occident une marque d’exclusion ou de transgression. Le Moyen Âge voyait dans les tissus rayés des étoffes diaboliques et la société moderne a longtemps continué d’en faire l’attribut vestimentaire de ceux qu’elle situait au plus bas de son échelle. 

A partir de l’époque romantique, ces rayures dégradantes, sans vraiment disparaître, commencent à s’atténuer et à être concurrencées par des rayures d’une autre nature, porteuses d’idées nouvelles : liberté, jeunesse, plaisir, humour. 

Aujourd’hui, les deux systèmes de valeurs poursuivent leur coexistence. Mais, plus que jamais, il y a rayures et rayures : celles du banquier ne sont pas celles du prisonnier.

Note de l'éditeur à propos de L'Étoffe du diable


Retour sur l'accrochage de la série

2010-2011
technique mixte sur papier
12 x (32 x 42 cm)


et

d'autres travaux de Caroline FOREST sur son site.


6.4.11

Gilles FROMONTEIL, 8 avril 2011

Retour sur l'accrochage dans Hublots du soir
et visite de l'atelier de GF. 


"Gilles Fromonteil est un artiste de l'Histoire, il la triture pour en extraire une nouvelle.




Triturer l'Histoire et la terre, dans le registre des arts décoratifs, en les détournant, dans une figuration fantasmagorique, avec un degré subtil de subversion dans la dénonciation des dérives des élites passées et présentes, caractérise le travail de cet artiste de la céramique. Par dérision des fastes aristocratiques et bourgeois passés qui voulaient que les tables étaient richement dressées de vaisselles les plus fines et des plus ornées, Gilles Fromonteil a fait de la pièce maîtresse des tables d'antan – la soupière – le socle de son travail. Il déjoue, en travaillant directement dans un atelier de production industrielle de porcelaine – un peu comme les impressionnistes qui étaient sortis de leur atelier pour se confronter à la nature et à ses effets – les processus complexes de fabrication de la soupière en porcelaine. Il découvre les heurts d'une fabrication de masse qui souffre peu les visions artistiques.

Dans ce dialogue entre industrie et création, il tire à la fois une production originale, épaissie d'une histoire du chaos social entre ceux qui font et ceux qui profitent."

Christian Garcelon,
Conseiller aux Arts plastiques, DRAC Poitou-Charentes, à l'occasion de la participation de G. Fromonteil à "Rurh 2010, Capitale européenne pour la Culture"




Les pièces exposées ont été réalisées
avec le soutien du Groupe Deshouilières.


D'autres réalistation de G. F sur son site,
dans Hublots du soir et dans cet album :



 

1.4.11

Laurent PATART (curateur), 1er avril 2011


[ Peint (re) ure (s) ]
Détail du verso d'un possible accrochage
D'abord, trois peintures sur toile représentant le même sujet, non signées et probablement réalisées, à la main, en Chine (peut-être à Da Fen), dans une "fabrique spécialisée" comme il en existe des milliers. Trois tableaux donc, comme il en existe peut-être des centaines d'autres identiques, partis de Chine en containers, il y a peut-être des années et pour une destination qui restera inconnue. Trois choses qui finissent par ressurgir, en vrac, entre articles de ménage et DVD de série Z, sur l'étalage d'un stand "Prix unique, fouillez, fouillez, c'est pas cher !" Un vendredi matin. A Ivry-sur-Seine, Val de Marne, France, Europe, Monde.

Ensuite, un texte commandé à ce propos :

« Tranche(s) »

Pas un tableau. Pas une image. Juste un non-lieu.

Une trois deux maisons, une deux trois toiles. Peinture en pâture et pour de vrai de quelque zone essaimée – non-ci, non-là, ni ailleurs –, lisière bornée qui est à la poétique paysagère ce que la petite maison dans la prairie serait à la déterritorialisation deleuzienne.