24.4.12

Anaïs LELIEVRE, 27 avril 2012


Erika, 2010
Indigestion, 2011

"Paroles et textes deviennent illisibles ou inaudibles. Leur structure s’informe en un magma inaccessible dont l’agitation suggère une inquiétude en latence, qui tend à se dire, qui excède toute mise en forme. Défaire le langage absorbé de l’extérieur, recracher la matière du corps premier. Placer au centre ce que le texte rejette – la déchirure d’une page blanche, l’erreur mise en boule, la souillure de la tache d’encre – comme traversé de quelque chose qui se dit, voire un autre langage, une autre forme, celle de l’insaisissable, l’expression de ce qui n’existe que dans le réel, hors des mots. Redonner une positivité à l’indicible qui hante ou transpire de la réalité, comme un bruissement silencieux."
A. L.


Pour le Hublot, Anaïs LELIEVRE a adapté à l'espace public son installation Mille et une petites boules noires à ramasser, 2010 (boules de papier imprimé noir, bottes bleues marines peintes en rouge):





Dernier gros plan dans Hublots du soir.

18.4.12

Patrick DANINO, 20 avril 2012


L'accrochage de Patrick DANINO dans Hublots du soir :

Voir, 2012, 96 x 88 cm
typo adhésive blanche, hublot, miroir, fil de nylon,
plexiglass, spectateur

et d'autres photographies de lui sur son site.

11.4.12

Philippe BRETELLE, 13 avril 2012



Coloriages de panaches, deux planches extraites d'un album inédit.

D'autres réalisations de Philippe BRETELLE sur son site, sur celui des Editions GANG dont il assure la direction artistique et dans Hublots du soir.

En prime, une petite piqure de rappel (s'il en était besoin) : au Hublot, on ne fait pas de politique mais on aime par dessus tout les poètes !


9.4.12

"Le Hublot" par Catherine RAVELLI

Pauline CASTAING, Développement, terre cuite patinée, 28 x 25 x 30 cm

[…] J’empruntai donc l’étroite voie bordée de troènes malingres qui longeait des habitations sombres et, apercevant au loin la lueur du Hublot éclairant les pavés, je pressai le pas. Cela me plaisait bien cette histoire. Cette galerie ouverte sur la place où, à la sortie de l’école, les enfants jouaient, se battaient ou se crachaient dessus pendant que les mamans un instant détendues discutaient entre elles, cette galerie pour une seule œuvre, cette galerie qui subvertissait toutes les règles du marché de l’art, puisque aussi bien par trois fois des gens célèbres l’avaient honorée pour rien, ou juste pour elle. Cette galerie ouverte aux rêveurs et aux acharnés, à ceux qui passent pourvu qu’ils osent, cette galerie soudain me parut très précieuse, ce Hublot intriguant. 

À hauteur de passant en effet, une fenêtre ronde, un hublot donc, grand comme une table conviviale, trouait un mur aveugle. Vivement éclairée, elle rayonnait jusqu’au tiers de la place où son double semblait flotter. Sur une espèce de cube, comme buvant la lumière, des hommes de plâtre blanc, bruyants, gesticulaient, affirmaient leurs idées en scandant des mots d’ordre. Ils faisaient la moitié de ma taille, mais exposés au niveau de mes yeux, j’ai craint un instant qu’ils ne s’échappent du Hublot et au passage me piétinent sans vergogne. 

Finalement, c’est ce qu’ils ont fait.

Rivés au sol, immobiles, ils avancent, la pesanteur pourtant accable leur course fictive, ce n’est pas un mouvement, mais une idée de mouvement qui les propulse ainsi. Ils marchent. Le pli d’un pantalon, réaliste, l’atteste. C’est une sculpture dans un hublot. Leurs jambes figées donnent le branle aux torses, qui sous l’impulsion se fragmentent et se brisent, se diffractent. Les épaules de ces hommes subvertissent le figuratif de leurs jambes entravées. Ils marchent. Le haut de leur corps et leurs voix se lovent dans l’abstrait du geste, forcément péremptoire. Ils marchent. Malgré le lourd lest de leurs souliers épais, ils marchent. Si nous ne le savons, eux savent où ils vont. Ils marchent. Leurs têtes explosées témoignent que ce qu’ils veulent excède leur enveloppe. De bas en haut la forme s‘émancipe, se rompt, se reconstruit dans une autre logique, celle où les choses enfin sont montrées comme elles sont. L’autonomie saisie et démontrée. Mais comment ? Comment peut-on élaborer une sculpture agitée et bruyante et réussir ainsi, suivant une simple verticale, en une banale ascension à peine suggérée, à passer du pesant qui vous plombe au léger impalpable ? Il est bientôt minuit ; je regarde le Hublot, je regarde dans le Hublot en pensant que pour la première fois de ma vie, j’ai envie d’acheter une sculpture, de l’avoir pour moi, pour qu’elle réorganise l’espace qu’on lui impose. […]

Alors, la honte m’envahit et pour la seconde fois je me suis mise à fuir, à fuir, éperdue, devant une sculpture. […]

Catherine RAVELLI
extrait de la nouvelle "Le Hublot" (*)
Accident voyageur, 2011, La Feuille de thé éditeur


(*) Texte inspiré par les sculptures de Pauline Castaing

3.4.12

Sylvie MAS, 6 avril 2012

Cinémascope, 2010, technique mixte sur papier, 22 x (18 x 24 cm) - vue d'exposition

1 /
Quelque part dans ses Carnets, Léonard de Vinci s’interrogeant sur la nature de la gravité et de la légèreté, en donne cette description qui conjugue la rigueur de l’observation scientifique à une poésie inattendue : « Ce corps est dit grave qui, laissé en liberté, se dirige vers le centre du monde par le chemin le plus bref. Ce corps est dit léger qui, laissé en liberté, fuit le centre du monde, et chacun est d’égale importance. »
Fruit d’un processus d’élaboration complexe, les sculptures de Sylvie Mas […] me semblent parfaitement incarner ces corps tantôt graves, tantôt légers. Entre densité et ténuité, chute et fuite, comme suspendues dans l’espace, ces œuvres partagent, entre elles et avec nous, une pensée de la forme en mouvement, une méditation sur le temps.


/ 2 /
Sylvie Mas […] assimile fréquemment ses formes coulées en plâtre à des « nuages ». Or, comme les taches, les flaques et les halos, le nuage ne possède pas de forme stable. C’est un état temporaire d’une matière impalpable, en mouvement. Aussi, lorsque Hubert Damisch analyse la fonction du nuage dans la peinture de la Renaissance, il observe que celui-ci échappe, par nature, à la grille rigoureuse formée par la perspective géométrique — et donc à la démonstration rationnelle de la perspective : « Si peindre c’est d’abord dessiner (…), si la peinture commence avec le contour (…), le nuage est connoté d’entrée de jeu comme élément hors la norme. »  Élément étranger au système réglé et codifié de la représentation picturale, le nuage en perturbe et en ouvre le champ.


/ 3
[…] Le « travail » demeure visible dans les sculptures de Sylvie Mas : tracés indiquant lignes de coupe et points d’assemblage, débordements de filasse et présence visible du châssis derrière les plans de plâtre, traces de découpes, de jointures et de collage… Ces signes du travail d’assemblage ne sont pas effacés, mais affichés car ils constituent, associés au dessin initial de la coulée de plâtre, le dessin de la sculpture achevée. C’est ce dessin qui, jouant des rythmes introduits par l’alternance de formes aux contours «mous», et de lignes géométriques de coupe et d’assemblage, qui assure la relation dynamique entre les éléments. Ce principe d’organisation n’est pas sans rappeler les fragiles constructions de Richard Tuttle, ni ce que Donald Judd percevait dans les reliefs de Hans Arp : «une bonne œuvre est un tout qui n’a pas de parties. Les protubérances ne peuvent jamais être clairement considérées comme des unités plus petites ; elles ne sont pas des unités secondaires. La perception du tout domine les impressions produites par les parties…» De même les sculptures de Sylvie Mas, bien que composées de fragments assemblés, sont avant tout perçues comme un « tout » organique, animé d’un intense mouvement intérieur.
extraits de « Le léger, le grave », texte consacré en 2010 à Gabriele Chiari et Sylvie Mas
à l’occasion de leur exposition commune à l’AGART



Retrouvez la pièce exposée dans Hublots du soir  :

Interférences, 2012
cadre numérique, meuble de cuisine, platre, clé usb, papier peint
142 x 150 x 60 cm

et d'autres travaux de Sylvie MAS sur son site et dans cet album :