- Malala, après tes voyages, dans l'espace, avec la scénographie, et dans le
temps, avec le roman graphique et le cinéma d'animation, tu reviens à quelque
chose de fixe et de plat: le tableau. À un endroit que je pourrais qualifier de
méta pictural...
- Oui enfin... sans employer de gros mots, disons que je m'intéresse à tout ce
qui constitue l'acte de peindre, avant de peindre même : tendre une toile sur
le châssis, fabriquer la peinture. Je bricole les éléments de base, le support,
le bois, la toile... je prends des tissus qui n'étaient pas du tout destinés à être
utilisés pour ça, du jersey de soie, de la laine, parfois transparents, élastiques,
fragiles, troués, filés, détricotés. Je fabrique du médium à peindre avec de la
cire d'abeilles... le travail de petits animaux, comme le ver à soie ou les
abeilles, est donc mis à contribution.
- ...des abeilles ?
- Oui. Dans ma dernière série, les petits animaux sont à l'honneur, même si on
ne les voit pas. Ce qui est représenté, ce sont des moments festifs, avec des
humains, qui se promènent dans des paysages par temps clair, se retrouvent
entre amis pour un vin d'honneur sous les frondaisons. Le support des peintures
a été filé, saccagé, laissant apparaître des trouées plus ou moins inquiétantes.
Des vides qui atteignent les humains, les ciels, les feuilles, des mailles qui
filent comme des petites comètes. Les traces de vide peuvent être les
trajectoires d'abeilles et d'insectes, peut-être en train de disparaître, c’est
peut-être leur absence que l’on voit ! Une raréfaction qui menace notre
existence et nos déjeuners sur l'herbe.
- Et tes prochains projets ?
- J'ai commencé une série sur les vers de terre.
Le site de Malala Béari ici
Son double Hublot du soir