A contrepied de sa pratique de photographe
studio, Wilfrid Gremillet s’intéresse dans un projet plus personnel aux zones
péri-urbaines, donnant une visibilité nouvelle à ces espaces souvent
transitoires, fonctionnels ou désaffectés. Fin observateur, le photographe
cherche à attirer l’attention sur ces interstices que l’on traverse sans voir,
sur ces lieux faussement vides où se côtoient mobiliers urbains, bâtiments
industriels et végétation. Prises de manière frontale puis accolées les unes
aux autres, ses photographies créent l’illusion de panoramas segmentés puis
recomposés, propices à multiplier les perspectives et à insuffler un dynamisme
dans la composition. Cette dernière est articulée autour d’un fil conducteur,
le plus souvent un mur, dont la linéarité est brisée par le chevauchement des
images et leur non-alignement. L’agencement d’ensemble ainsi déconstruit laisse
alors apparaître des ruptures, des coupes et des décalages qui jettent un
trouble et déréalisent la scène. Wilfrid Gremillet développe par ce biais une
esthétique de l’ambiguïté qui, si elle emprunte à la photographie
d’architecture ou de paysage, se décolle de sa plasticité documentaire en
incluant une impression d’artifice. Archéologie fictive de lieux existants, ce
projet en réinvente finalement la perception et suscite, chez le spectateur, de
nouvelles narrations possibles.